La règle des 5R appliquée au numérique
La règle des 5R du numérique responsable promeut la durabilité, la sobriété et l’efficience en 5 principes. Qu’il s’agisse des élements matériels ou des services, la règle des 5R servira de base à votre stratégie de réduction d’impact.
Cet article est une introduction et n’est à cet effet pas exhaustif.
1. Refuser
Il s’agit en premier lieu de mesurer la pertinence d’une démarche.
Pour un service par exemple, l’ajout d’une fonctionnalité apporte-t-elle un gain réel à l’utilisateur·rice ?
45% des fonctionnalités des services numériques ne sont jamais utilisées et 70% sont non indispensables.
MOOC numérique responsable, INR
Autre exemple : doit-on acheter des machines plus performantes à nos développeurs·euses ? Si leur machines actuelles sont encore opérationnelles, on peut considérer qu’un tel achat n’est pas nécessaire.
Outre le fait qu’un tel achat représente un coût pour l’entreprise, il peut participer à un effet rebond négatif, induisant des coûts plus difficilement mesurables.
On a pu observer ces dernières années la généralisation d’une “mauvaise” conception logicielle réalisée sur du matériel renouvellé et toujours plus performant qui a aboutit à l’abandon de certaines “bonnes” pratiques et optimisations. Ainsi, malgré les évolutions et améliorations des technologies web, un site Internet récent sera beaucoup plus long à charger qu’un site plus ancien.
Entre 1995 et 2022, le poids des pages web a été multiplié par 155 😮 !
Ecoconception web / les 115 bonnes pratique, Frederic Bordage
À noter que ces phénomènes sont accentués et aggravés par l’obsolescence logicielle. Depuis le 10 février 2020 l’article 27 de la loi AGEC vise à lutter contre ce type d’obsolescence.
2. Réduire
Cette étape requiert un audit préalable afin de mesurer ce qui peut être réduit, en plus des habitudes à mettre en place.
Côté logiciel, on peut facilement identifier les fonctionnalités inutiles et ainsi purger le code, facilitant par la même la maintenabilité/la perennité du code, et favorisant les gains de performances.
Côté matériel, on peut par exemple analyser l’intérêt de la démultiplication des écrans, gros consommateurs de ressources et d’énergie, éventuellement réduire leur nombre.
Les terminaux (et en particulier les écrans et téléviseurs) génèrent l’essentiel des impacts environnementaux (de 65 à 92%), suivi des centres de données (de 4 à 20%) puis des réseaux (de 4 à 13%)
Rapport sur l’empreinte environnementale du numérique en France, ADEME / ARCEP
Le changement des comportements au sein du personnel est un également un facteur d’économie, touchant à l’ensemble des supports. Avec les bons gestes, 1/4 de la consommations électriques des équipements pourrait être évitée :
- allonger la durée de vie des équipement ;
- limiter les flux de données ;
- éteindre et débrancher le matériel non utilisé ;
- supprimer les applications inutiles ;
- …
Voir à ce sujet les 10 ecogestes du numérique responsable et le programme AltImpact.
Un salarié français imprime en moyenne 20 pages par jour, soit un arbre par an !
Utiliser le WIFI plutôt que les réseaux mobiles, c’est réduire de 3 fois la consommation énergétique.
Guide « En route vers la sobriété numérique », ADEME
3. Réparer
On vise à allonger au maximum la durée de vie des équipements. La réparation tend a être mois onéreuse que l’achat et est de plus en plus encouragée (voir la loi AGEC).
Certaines grosses entreprises comme la Société Générale (signataire de la Charte du Numérique Responsable) ont publié des stastiques permettant de mesurer l'intérêt de la réparation du matériel. Selon votre structure, vous pouvez ainsi internaliser la réparation du matériel, ou à défaut déléguer celle-ci à des sociétés spécialisées, ou encore envisager la location de matériel auprès d'acteurs engagés comme la coopérative Commown.
En cas d’achat, on cherchera à utiliser du matériel ayant l’indice de réparabilité le plus élevé, ou a se fournir en matériel reconditionné.
Les services numériques étant immatériels, ils ne sont pas ciblés par cette démarche (sauf si on considère la gestion des bugs comme de la réparation 😉).
79 % de l’empreinte carbone du numérique provient de nos équipements, environ 16 % des centres de données et 5 % des réseaux.
Etude ADEME – Arcep sur l’empreinte environnementale du numérique en 2020, 2030 et 2050
4. Réutiliser
Le réemploi matériel peut prendre deux formes différentes dans l’univers du numérique responsable.
Le plus souvent, on considère le réemploi comme le fait de ne pas acheter un produit neuf mais plutôt de réutiliser un matériel déjà disponible dans l’entreprise, ou à défaut d’acheter un produit reconditionné ou d’occasion, ou encore de louer ce produit. Le matériel n’ayant plus de fonction peut enfin être donné à des associations et ainsi favoriser l’économie circulaire.
L’autre aspect du réemploi matériel est le fait de donner une nouvelle fonction à l’objet ne pouvant plus assurer pleinement sa fonction initiale (terme d’upcycling ou surcyclage dans l’univers de la mode). Il s’agit alors plus du principe de réparation (exemple de la réinstallation complète avec un système d’exploitation plus léger pour prolonger la durée de vie de la machine).
Il se vend environ 3,1 millions d’ordinateurs par an en France, soit l’équivalent de plus de 8 400 ordinateurs par jour.
Ventes d'ordinateurs en France, Planetoscope
Côté logiciel, la notion de réemploi est souvent plus difficile mais peut-être envisagée selon l’architecture de vos projets. Les architectures dites en micro-services" favorisent le plus souvent cette approche.
5. Recycler
Cette dernière étape doit être la plus rarement exploitée et signifie qu’un produit ou service ne peut pas être traité par les autres “R”. Bien que la location de matériel soulage l’entreprise de cet aspect, il reste néanmoins pertinent d’avoir conscience de cette étape même si elle est externalisée.
Dans le monde, c’est 53 millions de tonnes de déchets électroniques en 2019, avec une augmentation de 21% en 5 ans et seulement 17% qui sont recyclés.
Article « 53 millions de tonnes de déchets électroniques en 2019 », INR
Cette étape ne concerne évidemment pas les services numériques qui sont immatériels. Elle peut néanmoins permettre de réfléchir à la nécessité d’abandonner intégralement certains services en questionnant leur utilité globale. Par exemple, un annuaire électronique pour une PME est-il vraiment nécessaire ?